dimanche 7 juin 2015

Nous ne sommes pas prêts de manger des insectes

Manger des insectes, c'est le petit buzz qui monte et qui monte. Malgré l'engouement, notre société est-elle prête ? Et si nous nous trompions de stratégie ?

Les insectes à croquer font de plus en plus parler d'eux . Qu'ils soient promus par Kofi Annan où même envisagés comme « une filière d'avenir pour la France » ... Ils n’ont pas l’air bien appétissants pour nous, qui n’avons pas vraiment de liens avec l’entomophagie (le fait pour un humain de manger des insectes).
Il est certes devenu plus simple de les intégrer dans notre bol alimentaire, note le site américain « NPR » . Nous pouvons désormais acheter des sucettes au scorpion ou des produits cuisinés à base de farine de grillon... Mais nous partons de loin. Selon la chercheuse britannique Ophelia Deroy qui a conduit plusieurs enquêtes, une très large majorité d’Occidentaux n’a encore jamais mordu d’insecte.

Pas tant que ce n’est pas meilleur

Législateurs et médias sont partis du principe (pas totalement infondé peut-être) que les insectes nous dégoûtent. Après tout, nous avons appris à les associer à la contamination et aux maladies qu’ils peuvent transmettre. Pour nous convaincre désormais, l’accent est mis sur : manger des insectes, c’est nutritif, et c’est bon pour l’environnement, résume Ophelia Deroy dans une tribune pour la revue « Nature » .
Mais sans doute « nous devrions penser un peu moins à combattre le dégoût et un peu plus à susciter le goût », encourage la chercheuse, qui estime qu’il faut rendre l’expérience moins effrayante et plus agréable. Pour elle, le déclic fut un grillon vaporisé « d’une très belle poussière dorée » au milieu d’une salade.

Booster l’image

Des soirées promeuvent parfois les burgers à la sauterelle et les sushis aux vers, à grands renforts de chefs-stars aux fourneaux et de starlettes aux assiettes. D’ailleurs selon Robert Nathan Allen, à la tête de Little Herds qui promeut les insectes comestibles, « les chefs (et leurs invités célèbres) jouent un rôle primordial pour rendre les grillons sexy, tout comme ils ont transformé les poissons crus, dangereux, ou peu ragoûtants, en sushis, LE plat des élites d’Hollywood ».
Ophelia Deroy partage aussi l’avis qu’il faudrait « glamouriser » un peu les insectes... En changeant leurs noms par exemple ! En 2004, l’Australie qui souffrait alors d’une terrible invasion de sauterelles, a changé son nom anglais « locust », en « sky prawn » (littéralement crevette du ciel) pour la rendre plus appétissante.
« Et nous ne devons pas oublier les amateurs de sucreries », prévient Ophelia Deroy : « beaucoup d’insectes tombent naturellement dans la catégorie "dessert" ». Il doit certes y avoir mieux que les sucettes au scorpion. « C’est à nous de rendre les insectes attirants et abordables avant d’espérer changer les mentalités et les goûts », rappelle Ophelia Deroy. Oubliez donc les arguments nutritifs et environnementaux, exigez qu’on vous serve des insectes plus « sexy ».

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Source : Les Echos, Marion Degeorges, 07/06/2015
http://www.lesechos.fr

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