mardi 29 septembre 2015

Les insectes sont-ils plus sains que la viande ?

Une comparaison des profils nutritionnels des insectes à la viande mène au constat que les insectes sont plus appropriés pour lutter contre la sous-alimentation que la suralimentation.

Les insectes sont de plus en plus souvent présentés comme la source de protéines du futur. Si leur empreinte environnementale est assurément plus légère que celle de grands quadrupèdes, leur avantage nutritionnel n’a jusqu’à présent pas été clairement documenté.

D’où l’intérêt de cette étude menée par des chercheurs du Japon et du Royaume-Uni, mettant à l’épreuve l’hypothèse selon laquelle les insectes sont, d’un point de vue nutritionnel, préférables à la viande.

Deux modèles sur les bancs d’essai

Pour répondre à cette question, ils ont comparé les données de trois viandes fraîches (bœuf, porc et poulet) à celles de 6 espèces d’insectes, et ce pour l’énergie ainsi que 12 nutriments. Cette comparaison a été faite selon deux modèles:

  • le Nutrition Profiling de la FSA britannique, dit modèle Ofcom, qui a été développé pour lutter contre la malbouffe (aliments trop gras, salés et/ou sucrés), donc pertinent dans un contexte de suralimentation,
  • le Nutrient Value Score (NVS), utilisé dans l’est de l’Afrique et plus approprié au contexte de sous-alimentation.

Criquet, charançon et vers de farine plus nutritifs

Les résultats montrent d’abord une grande hétérogénéité des scores parmi les insectes, comparativement aux viandes. Trois insectes (le criquet, les larves de charançon et le vers de farine) obtiennent un meilleur score NVS que les viandes, ce qui signifie qu’ils sont particulièrement utiles dans un contexte de sous-alimentation.

Par contre, aucun insecte n’apparaît comme plus sain que la viande selon le score Ofcom, et ne peuvent donc pas faire valoir de supériorité nutritionnelle dans un contexte d’abondance.
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Source : foodinaction.com, Nicolas Guggenbühl, 28/09/2015

Référence : Payne C.L. et al. Are edible insects more or less 'healthy' than commonly consumed meats? A comparison using two nutrient profiling models developed to combat over- and undernutrition. Eur J Clin Nutr. 2015 Sep 16.

jeudi 24 septembre 2015

La première boucherie végétarienne de France à ouvert à Paris.

La première boucherie végétarienne de France vient d’ouvrir place d’Aligre à Paris. Elle s’adresse en particulier aux « flexitariens », soucieux de réduire leur consommation de viande pour des raisons environnementales et éthiques.

Manger de la viande...sans viande !
Le concept arrive à Paris avec la Boucherie végétarienne, ouverte depuis le 30 mai place d’Aligre dans le XIIe arrondissement. « Nous voulons sortir le végétarisme de ses frontières qui sont, à mon avis, trop strictes » déclare tout de go Philippe Conte, co-fondateur de la Boucherie végétarienne avec Isabelle Bensimon. Ce propriétaire enthousiaste souhaite ainsi attirer des consommateurs d’un nouveau genre, les « flexitariens ».

Le « flexitarisme » ? Un mouvement né aux Etats-Unis et qui s’est propagé aux Pays-Bas, en Suisse et en Allemagne ses dernières années. Doucement, il fait sa place en France. Ses adeptes, les "flexitariens", aiment la viande, oui,  mais sans abus.  Ils ont compris qu’une consommation quotidienne était néfaste et pour eux et pour l’environnement.

Manger pour préserver la nature

Philippe Conte l’explique très bien : « la production de viande est la première cause d’émission de gaz à effet de serre ». Le méthane et le protoxyde d’azote sont en effet émis par les déjections du bétail. Au regard du cheptel mondial, les conséquences sont désastreuses.

Outre cette émission directe de gaz à effet de serre, une grande partie de la déforestation primaire, comme au Brésil, en Indonésie ou au Congo, est due à la fabrication de l’alimentation des bêtes. Les forêts vierges sont détruite au profit des cultures vivrières, en général du soja. Le but étant de nourrir les animaux qui serviront ensuite à l’alimentation humaine.

« Mieux vaut donc se nourrir de végétaux directement, que de viande qui a elle-même consommé ces végétaux » justifie l’entrepreneur. Et pour Philippe Conte, manger des simili-carnés n’a que du bon puisque le soja utilisé pour sa production est certifié RTRS. Sans OGM, il est donc éthique, équitable et n’est pas issu de la déforestation primaire.

Un vrai goût de viande

La viande végétarienne, fabriquée aux Pays-Bas avec du soja, des pois et du froment, est conditionnée à -30 degrés pour obtenir les mêmes aspect et texture que la viande animale. Et le résultat est bluffant. Les morceaux de « poulet » des wraps ont exactement le goût de la vraie volaille. A la fois croustillant et savoureux, le poulet de la Boucherie végétarienne a donc tous les arguments pour convaincre les flexitariens.

C’est d’ailleurs lors d’un voyage aux Pays-Bas avec Isabelle Bensimon, que Philippe Conte goûte pour la première fois à la viande végétarienne. Sans le savoir. Impressionnés d’avoir mangé de la « fausse » viande aussi savoureuse, les deux associés décident alors de développer ce concept en France.

La Boucherie végétarienne est ainsi née, et depuis un mois, les clients affluent. Trinh, traiteur végétal à Saint-Mandé (Val-de-Marne), vient spécialement place d’Aligre pour goûter les simili-carnés qui font déjà beaucoup parler d’eux. Intriguée, la végétalienne aimerait intégrer ce type d’aliments dans sa production. Pour elle, l’ouverture de boucherie est du pain béni car « pour l’instant, il n’y a pas vraiment d’offre en France».

Créer l’envie

Philippe Conte en est persuadé, il suffit de proposer une alternative de qualité à la viande industrielle pour que la demande suive. Les lasagnes, burgers, et autres nuggets, grâce aux simili-carnés, deviennent  plus sains. Selon lui, « comme dans de nombreux domaines, la France est en retard mais sait très vite le rattraper ». Avec son associée, ils espèrent donc un développement rapide de ce marché.

Le propriétaire de la Boucherie végétarienne a vu juste. Depuis son ouverture, la fréquentation ne faiblit pas. L’ampleur du phénomène est telle, que des gens de la France entière aimeraient, eux aussi, se faire livrer ces fameux produits. La chose sera possible d’ici début 2016, via le site internet de la boutique. Le temps de mettre en place les moyens logistiques pour satisfaire ses futurs clients.

Des clients sensibilisés

« Notre clientèle est très diverse », se réjouit Philippe Conte. Beaucoup de jeunes, soucieux de combattre la souffrance animale, viennent pour remplir leur frigo de ces simili-carnés. « Nous rencontrons aussi de plus en plus de personnes qui nous disent vouloir réduire leur consommation de viande à cause de son impact sur le changement climatique » poursuit-il.

Une autre raison avancée par les flexitariens  soucieux de réduire leur consommation de viande, c'est la santé. « Les animaux d’élevage intensif sont gavés d’antibiotiques pour éviter aux maladies de se propager. » Philippe Conte persiste et signe. Manger de la viande végétarienne n’aurait finalement que du bon. Les personnes âgées, elles, achètent, bien souvent la viande végétarienne pour des questions de cholestérol.

Un végétarisme grand public

Les co-fondateurs de la Boucherie végétarienne n’ont pas choisi l’emplacement de leur boucherie au hasard. Le marché d’Aligre étant, selon les propriétaires, "une référence de l’alimentation à Paris car on y trouve des produits de qualité et innovants".

Isabelle Bensimon et Philippe Conte avaient en effet à cœur de s’adresser à tout le monde, et pas seulement aux "bobos parisiens", cette classe aisée, vaguement bohème et snob.

Et quand on lui demande si le terme "viande végétarienne" ne perturbe pas sa clientèle, Philippe Conte sourit. Il aime l'expression, un joli « viandoxymore » selon lui.
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Source : information.tv5monde.com, Amélie Revert, 13/07/2015

lundi 21 septembre 2015

La Suisse pourrait autoriser la consommation alimentaire d’insectes

Le gouvernement suisse a lancé la révision de l’Ordonnance sur les denrées alimentaires. Elle prévoit de considérer désormais comme comestibles les trois espèces les plus connues comme alimentaires, soit la larve du ténébrion meunier (ou ver de farine), le grillon domestique et le criquet migrateur.
Le texte a été mis en consultation à fin juin et les milieux intéressés ont jusqu’à fin octobre 2015 pour donner leur avis. L’OSAV (Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires) s’attend à ce que cette ordonnance révisée puisse entrer en vigueur dans le second semestre de 2016. Actuellement, une évaluation globale des risques est en cours. « Il pourrait encore y avoir des modifications ou des adaptations », précise l’Office.
Plusieurs producteurs sont d’ailleurs déjà sur les rangs, comme Essento ou Entomos.
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Source : swissinfo.ch, 12 août 2015

lundi 14 septembre 2015

Changeons notre chaîne alimentaire pour résoudre la crise de l’élevage

L’élevage français est en crise, les prix de la viande de porc ou du lait ne permettent pas d’assurer un juste revenu aux éleveurs. Comble du désarroi, nos voisins allemands ou espagnols parviennent à produire de la viande de porc à des prix encore plus bas que les éleveurs français, et emportent ainsi de nouvelles parts de marché. Inutile de s’étonner d’une telle situation puisqu’on a transformé l’élevage en industrie, en créant de toutes pièces des usines à lait, à volailles ou à porc et chacun sait qu’en matière d’industrie, ce sont les entreprises les plus compétitives qui gagnent. Et comment défendre les productions françaises, si l’usine à porc bretonne a exactement les mêmes caractéristiques que sa sœur allemande.

Xavier Beulin, le président de la FNSEA a la solution. Il demande trois milliards d’euros de financement pour développer des infrastructures analogues à celles de nos voisins et souhaite des allégements de charges sociales et de contraintes environnementales. De cette manière, la concurrence sera de plus en plus exacerbée et les élevages devront franchir un pas supplémentaire dans l’industrialisation, la spécialisation et la diminution des coûts de production.

Pour un nouveau paradigme

Au final, pourquoi ne pas délocaliser les usines animales au Brésil ou ailleurs, comme cela a déjà été fait pour les volailles. Toute cette évolution est, bien sûr, monstrueuse sur le plan du respect du vivant, totalement inadaptée sur le plan écologique, absurde sur le plan économique et social et même inefficace sur le plan nutritionnel.

Finalement, l’étendue des dérives des élevages industriels dans le monde est le reflet d’une crise profonde de civilisation que l’humanité devra résoudre pour clarifier ses rapports avec la nature, affirmer son respect du vivant et développer des modes alimentaires durables et équitables. C’est d’un changement de paradigme dont nous avons besoin. Quels traitements devons-nous accorder aux animaux ? Quelle juste place accorder à l’avenir à l’élevage après des millénaires de co-évolution avec les populations humaines ? Comment intégrer l’élevage dans une démarche globale d’agroécologie ? Quelles proportions de calories d’origine animale avons-nous réellement besoin ?

Les réponses à ce questionnement sont relativement simples et seule leur prise en compte permettrait de sortir de cette situation absurde dans laquelle une majorité d’éleveurs se sont fourvoyés avec le consentement tacite des consommateurs trop souvent attirés vers les prix les plus bas, et l’encouragement d’un marketing alimentaire à consommer beaucoup de produits animaux pour satisfaire des pseudo besoins nutritionnels.

La première question à résoudre est celle du respect des animaux, de leur comportement au-delà du soit disant bien être animal, un concept largement manipulé pour justifier l’enfermement des animaux délivrés des risques et des aléas naturels. Le comportement de chaque espèce ou race animales est parfaitement connu, celui de la vache de brouter l’herbe des prés ou le foin récolté, celui de la poule de gratter et picorer, du cochon d’utiliser son groin pour consommer feuilles, tiges et racines, et de se vautrer dans la boue pour se rafraîchir.

Le seul contrat domestique qui puisse être recevable entre l’éleveur et ses animaux serait que les conditions d’élevage soient compatibles avec le comportement global de l’espèce. Seulement, une conduite d’élevage la plus naturelle possible entraîne des contraintes considérables. Il est bien plus facile d’élever des porcs sur caillebotis qu’en plein air, de développer des élevages de chèvres hors sol que de conduire au pâturage ces animaux capricieux, de regrouper dans des usines à lait un nombre très élevé de vaches laitières autour d’un robot de traite plutôt que de déplacer un troupeau entier.

Les conditions contre nature des élevages industriels ont été en vain souvent montrées et dénoncées et au final justifiées par la prétendue nécessité nutritionnelle de fournir à chaque consommateur des quantités suffisamment élevées de produits animaux, à l’instar de ce slogan ministériel abusif des trois produits laitiers par jour, inefficace pour améliorer la santé osseuse. En fait, du point de vue nutritionnel, nos besoins quantitatifs en protéines animales sont très faibles. Cela tombe bien, car pour sortir de l’impasse, nous n’avons pas d’autre choix sur le plan éthique que de pratiquer des élevages plus naturels et moins performants, en améliorant même si possible les pratiques anciennes pas toujours vertueuses.

De nouvelles conduites d’élevage, exemplaires sur le plan du respect du comportement animal redonneraient un sens au métier d’éleveur et leur permettraient bien plus sûrement de gagner leur vie par la valorisation de leur production. Certes les prix de la viande et du lait doubleraient certainement, mais d’un autre côté, sur le plan de la santé publique, il serait souhaitable de consommer deux fois moins de produits animaux (qui plus est de meilleure qualité nutritionnelle). L’équation économique serait ainsi largement inchangée pour un bénéfice social et écologique considérable.

Réduire la consommation en produits animaux en Occident

Il est bien connu que les régimes alimentaires de type occidental sont bien trop riches en calories d’origine animale - qui représentent près du tiers de l’énergie ingérée. Cette consommation élevée de produits animaux pose en effet des problèmes de santé publique, en particulier via les graisses animales. Aussi pourrions-nous diminuer leur consommation de moitié : 15 % des calories en produits animaux équivalent encore à une consommation d’un yaourt, d’un œuf et de 100g de viandes par jour, ce qui peut suffire au plus grand nombre !

Inutile de rentrer dans le débat végétarien, une modération très sensible de la consommation de produits animaux serait déjà une solution raisonnable sur le plan nutritionnel et culturel, qui permettrait enfin une conduite plus écologique de l’élevage. Encore faudrait-il que les pouvoirs publics donnent un signal fort aux citoyens pour parvenir à réduire de moitié en 20 ans le niveau de consommation actuel des calories d’origine animale - ils ont plutôt tendance à faire l’inverse - en expliquant les bénéfices et les enjeux d’une telle évolution, à l’instar des objectifs de réduction de gaz à effet de serre.

D’ailleurs, la désintensification de l’élevage est aussi un objectif écologique majeur, puisque ce secteur par ses émissions directes, ou via les activités agricoles qui lui sont liées est responsable selon la FAO de près de 15 % des émissions de gaz à effet de serre. Le développement des élevages industriels de par le monde pour répondre à une consommation toujours croissante de produits animaux devrait déjà être dénoncé dans le cadre de la COP 21, ce qui serait une amorce de changement salutaire.

Développer un autre discours nutritionnel

Cependant l’élévation de la consommation de produits animaux demeure encore un marqueur culturel fort d’un enrichissement économique qu’il serait urgent de dénoncer. Les discours nutritionnels conventionnels ont trop longtemps mis l’accent sur les besoins en protéines si bien que beaucoup d’hommes le perçoivent comme le besoin majeur à assouvir avec les conséquences que l’on sait.

Il devient urgent de développer un autre type de vulgarisation, en cessant de justifier voire de soutenir les dérives des élevages actuels et en prônant une consommation modérée de produits animaux, puisque les besoins humains en protéines sont si faciles à couvrir en particulier par une alimentation végétale diversifiée.

Seule une perception plus juste de nos besoins pourrait contribuer à donner une place plus juste à l’élevage dans la chaîne alimentaire. Enfin délivrés de contraintes quantitatives insoutenables, des élevages plus nombreux et mieux répartis sur le territoire pourraient aider au développement d’une agro écologie nouvelle, tout en valorisant des espaces ou des productions agricoles.

Voilà, en tant que citoyens nous sommes responsables par nos choix alimentaires de l’évolution des élevages avec des conséquences écologiques et socio-économiques majeures. Les agriculteurs et les éleveurs devraient également prendre conscience de la complexité du problème et afficher la volonté ferme de le résoudre, plutôt que de chercher à produire toujours plus. Quand au discours politique, il est terriblement absent, comment pourrait-on parler juste à propos de climat ou d’écologie, tout en ayant une approche aussi conventionnelle et désuète en matière d’alimentation humaine pour satisfaire les lobbies. C’est à la société tout entière de remettre en question son approche de l’élevage et de ses habitudes alimentaires. Cela prendra du temps !

Christian Rémésy est nutritionniste et directeur de recherche à l’Institut national de recherche agronomique
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Source : C. Rémésy, LeMonde.fr, 2 septembre 2015

vendredi 11 septembre 2015

Matthieu Ricard : « Pour des menus végétariens à l’école »

Matthieu Ricard est essayiste, moine bouddhiste tibétain. Il sera présent au Monde Festival pour une « conversation » sur le thème « Faut-il continuer à manger de la viande ? » dimanche 27 septembre à 15h30 à l’Opéra Bastille.

S’opposant à l’introduction d’un menu végétarien au choix pour les élèves des écoles, menu laïque par excellence qui a la vertu de ne pouvoir offenser personne tout en étant bon pour la santé, l’environnement et, bien sûr, les animaux, le maire de Châlon-sur-Saône, Gilles Platret, a déclaré qu’un tel menu posait « d’énormes problèmes » et que, « selon un grand nombre de diététiciens », le régime végétarien « n’apporte pas toutes les ressources nutritionnelles suffisantes pour l’enfant, en particulier le fer, dont la carence est source de fatigue pour l’écolier ».

Lire aussi : Le repas végétarien, le plus laïc de tous

Feu mon père Jean-François Revel parlait de la « connaissance inutile », qui est aussi le titre de l’un de ses ouvrages. Il est en effet désolant que des connaissances scientifiques avérées et aisément accessibles soient traitées comme si elles n’existaient pas. Le mythe des protéines « incomplètes », perpétué notamment par l’industrie de la viande, repose sur des recherches anciennes et désuètes.

Selon des données plus fiables fournies par l’Organisation mondiale de la santé et l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les neuf acides aminés essentiels sont présents en quantité et en proportions suffisantes dans la plupart des nourritures végétales. De plus, en ce qui concerne la teneur en protéines, la comparaison d’une centaine d’aliments, établie par la FAO, montre que les 13 premiers de la liste sont des végétaux (dont le soja, 38,2 %, le pois carré, 33,1 %, le haricot rouge et les lentilles, 23,5 %) et un champignon (la levure de bière, 48 %).

La viande, loin derrière les nourritures végétales

La première viande, le jambon de porc, vient en 14e position avec 22,5 %, le premier poisson, le thon, en 23e position avec 21,5 %, tandis que les œufs et le lait viennent respectivement en 33e et en 75e position avec seulement 12,5 et 3,3 % de protéines. Une alimentation normale à base de végétaux suffit donc largement à pouvoir à nos besoins en protéines, en quantité et en qualité. De fait, c’est la nourriture carnée qui pose des problèmes. Une étude menée par l’institut EPIC (European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition), portant sur 521 000 individus, a montré que les sujets qui mangeaient le plus de viande rouge avaient 35 % de risques supplémentaires de développer un cancer du côlon que ceux qui en consommaient le moins.

D’après une autre étude publiée à l’université Harvard en 2012 par An Pan, Frank Hu et leurs collègues, portant sur plus de 100 000 personnes suivies pendant de nombreuses années, la consommation quotidienne de viande est associée à un risque accru de mortalité cardio-vasculaire de 18 % chez les hommes et de 21 % chez les femmes, tandis que la mortalité par cancer représente respectivement 10 % et 16 %. Chez les gros consommateurs de viande rouge, le simple fait de remplacer la viande par des céréales complètes ou d’autres sources de protéines végétales diminue de 14 % le risque de mortalité précoce. Par ailleurs, à cause du phénomène de bioconcentration, la viande contient environ quatorze fois plus de résidus de pesticides que les végétaux, les produits laitiers cinq fois plus.

Les polluants organiques persistants s’accumulent en effet dans les tissus graisseux des animaux et entrent ainsi dans l’alimentation humaine. Ces polluants organiques se retrouvent également dans la chair des poissons d’élevage, nourris d’aliments concentrés fabriqués entre autres à partir de protéines animales. Ces molécules sont non seulement cancérigènes, mais aussi toxiques pour le développement du système nerveux du fœtus et des jeunes enfants. Quant à la vitamine B12, indispensable à la formation de l’hémoglobine du sang, elle est pratiquement absente des plantes, mais on la trouve dans le lait et les œufs. Les végans [qui s’abstiennent de toute nourriture d’origine animale] ont, par conséquent, besoin de s’en procurer sous forme de compléments alimentaires, qui peuvent être fabriqués à partir de cultures de bactéries.

Recommandations inappropriées

Au vu des études menées depuis une vingtaine d’années, affirmer, comme le fait l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes), à propos de ceux qui souhaitent s’abstenir de produits d’origine animale que « ce type d’alimentation fait courir à long terme des risques pour la santé » est donc scientifiquement inexact. Les recommandations qui en découlent sont, par voie de conséquence, inappropriées.

Pour ceux qui penseraient que le fait d’être végétarien affecte les performances physiques, la liste des champions végétariens et végans parle d’elle-même : Carl Lewis, titulaire de neuf médailles d’or aux Jeux olympiques, Bode Miller, médaillé olympique de ski alpin, Edwin Moses, invaincu 122 fois d’affilée sur le 400 mètres haies, Martina Navratilova, détentrice du plus grand nombre de titres dans l’histoire du tennis, l’ultramarathonien américain Scott Jurek, Patrik Baboumian, dénommé « l’homme le plus fort du monde », Fauja Singh, un Indien végétarien qui fut le premier centenaire à courir un marathon et le jeune champion du monde de la mémoire, Jonas von Essen.

Les assureurs ne s’y trompent pas : aux Etats-Unis, Kaiser Permanente, une importante société d’assurance-maladie, avec plus de 9 millions de membres, incite les médecins à « recommander une diète à base de végétaux à tous leurs patients ». Au Royaume-Uni, une assurance-vie propose même 25 % de rabais pour les végétariens et les végétaliens. Les auteurs d’une étude anglaise réalisée sur 65 000 personnes dont 17 000 végétariens ou végans concluent : « Les gouvernements qui désirent mettre à jour leur définition d’un régime propice à la santé et respectueux de l’environnement doivent recommander de diminuer la consommation de produits animaux. » A bon entendeur, salut !

Changer le monde : c’est le thème de l’édition 2015 du Monde Festival qui a lieu les 25, 26 et 27 septembre à Paris avec Anne Hidalgo, Emmanuel Macron, Thomas Piketty, Matthieu Ricard, Evgeny Morozov, Jordi Savall… Comment réguler Internet ? Va-t-on vers la fin de la croissance ? Quels contre-pouvoirs à la civilisation numérique ? La musique peut-elle changer le monde ? Retrouvez le programme sur Le Monde Festival.
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Source : LeMonde.fr, 1er septembre 2015

jeudi 10 septembre 2015

En Bolivie, des biscuits aux lombrics pour faire le plein de protéines

(AFP) - Une poignée de lombrics se tordent dans un mélange d'eau et de sel, jusqu'à se vider et mourir. Réduits en farine, ces vers de terre entreront ensuite dans la composition de biscuits riches en protéines vendues dans des petites boutiques de Bolivie. "Après cette étape, nous les mettons au four, à 50 degrés, pendant une heure. Les vers de terre sortent comme du +charqui+ (de la viande séchée) et passent ensuite à la meule pour obtenir de la farine", explique à l'AFP Leydi Rios, technicienne dans la petite fabrique artisanale de biscuits du Centre agricole Jhesua, à Paracaya, dans la région de Cochabamba (centre).

Le patron de l'entreprise, Jesús Orellana, un technicien agricole de 26 ans, raconte avoir eu cette idée après un voyage au Mexique, où il vu des exemples de lombriculture. Il assure que le procédé pour obtenir la farine est extrêmement méticuleux et garantit la propreté du produit fini, les lombrics subissant un traitement spécial destiné à vider leurs intestins.

Eisenia foetida, un lombric rouge de Californie capable de dévorer l'équivalent de son poids chaque jour, mesure 3 à 5 mm de diamètres pour 6 à 8 cm de long et pèse environ 1,5 gramme. Chaque lombric peut produire jusqu'à un kilo de jeunes par an et il faut 16 kg de vers pour 900 g de farine.

Il sort de son atelier 125 kilos de biscuits par mois.

Produit phare

"La farine de lombric est très bonne pour la santé", affirme M. Orellana, qui a lancé cette année la production de ses galettes dans la région de Paracaya, à 2.500 m d'altitude. Ce produit "améliore la masse musculaire, augmente l'activité cérébrale, empêche l'anémie. C'est bon pour le diabète aussi", détaille l'entrepreneur.

D'après un rapport qu'il a commandé à la Faculté de médecine et de biochimie de l'Université publique San Simon de Cochabamba, "dans 100 grammes de farine de lombric, il y a 44,7% de protéines, ainsi que du calcium, du fer et du phosphore". Les chercheurs ont également identifié des acides aminés essentiels, vitaux pour la croissance, le système immunitaire et la réparation des tissus musculaires.

La farine de vers de terre est mélangée avec de la farine de blé, d'orge ou de haricot puis on y ajoute du chia, des antioxydants, de calcium, des protéines et des oméga 3. Pour donner de la saveur aux biscuits, la recette comprend aussi des extraits naturels de noix de coco et de vanille.

"C'est notre produit phare", sourit Roxana Borges, distributrice des galettes, qui tient une boutique à Paracaya. Elle sont achetées notamment par des mères à la recherche de produits riches pour leur progéniture, mais qui demandent qu'on retire l'image du ver de terre sur les emballages. "Les gens au début réagissent en disant "Comment je vais manger ça ?", puis ils se rendent compte que c'est bon", raconte-t-elle. "Le goût est bon, (mais) avant je ne voulais pas en manger", raconte à l'AFP Yesenia Nina Tenorio, 20 ans, en ajoutant que cela ressemble à n'importe quel biscuit.

Dans d'autres pays, le ver de terre est déjà mis à profit pour divers usages : production d'humus pour les cultures à partir des déchets végétaux, ou en médecine homéopathique pour augmenter les taux de glucose, triglycérides et créatinine, par exemple au Mexique.
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Source : AFP, leparisien.fr, 2 septembre 2015

mercredi 9 septembre 2015

La viande in vitro, solution d’avenir ou gadget high tech ?

La demande mondiale de viande devrait doubler d’ici à 2050, avec de lourdes conséquences environnementales et sanitaires. La viande artificielle tente de s’imposer comme une alternative crédible.

La colère des éleveurs français, qui manifestent et bloquent les routes depuis juillet pour dénoncer les baisses de prix intenables du lait et de la viande, a de multiples causes: pression de la grande distribution, distorsions de concurrence avec des pays européens comme l’Allemagne, fermeture de marchés exports comme la Russie… mais aussi, de façon plus structurelle, le déclin depuis plusieurs années de la consommation de viande en France, essentiellement lié au recul de celle de viande bovine. Une tendance lourde dans une nation de carnivores (encore 88 kg de viande par habitant et par an), mais qui est loin d’être unique puisqu’ aux États-Unis, pays du hamburger, on parle d’un peak meat (comme du peak oil pour le pétrole), c’est-à-dire d’un maximum de consommation carnée, atteint en 2004 (après une progression spectaculaire débutée vers 1945).

La FAO constate d’ailleurs une certaine stabilisation de la consommation mondiale de viande par habitant, après avoir triplé en cinquante ans. Aujourd’hui, celle-ci est en moyenne de 42,9 kg par habitant (76 kg dans les pays développés contre 33,7 dans les pays en développement). En revanche, la production totale ne cesse de progresser au rythme de la démographie (près de 312 millions de tonnes en 2014 selon ses estimations, en hausse de 1,1% par rapport à 2013). Et les perspectives de croissance de la FAO anticipent un quasi doublement de la production à l’horizon 2050, pour répondre à la demande de 9 milliards d’humains. D’autant que, si la consommation par personne stagne ou régresse en Occident, la plupart des experts tablent sur une forte hausse dans les régions en développement, à la faveur de l’augmentation des revenus et de l’urbanisation.
Cette perspective est bien connue et ses conséquences également. Entre 70 et 80% des terres arables (pâturages, cultures destinées à l’alimentation animale) sont d’ores et déjà mobilisées pour l’élevage, activité par ailleurs très gourmande en eau et polluante puisque responsable de 18% des émissions de gaz à effet de serre selon la FAO (un chiffre de 2006 qui inclut les émissions de méthane par les ruminants, la déforestation au profit du soja, le transport, etc).

Pour de nombreux experts, le défi de nourrir neuf milliards d’individus ne sera soutenable qu’à condition de changements profonds des comportements alimentaires dans les pays riches. Catherine Esnouf, directrice scientifique adjointe «alimentation» de l’Inra, énumère trois conditions essentielles: lutter contre le gaspillage alimentaire (qui peut atteindre 30% de la production), accroître massivement le commerce mondial pour approvisionner les régions du monde déficitaires en protéines animales et, surtout, «réduire à 500 la consommation de calories animales par personne et par jour, contre 1.200 actuellement dans les pays de l’OCDE». Un pari sur l’avenir loin d’être gagné.

Frankensteak

C’est dans ce contexte qu’un chercheur de l’université de Maastricht, aux Pays-Bas, Mark Post, a triomphalement présenté en août 2013 le premier steak entièrement élaboré en laboratoire à partir de cellules de muscle de vache, multipliées in vitro à l’aide de facteurs de croissance pour former quelque chose ressemblant fortement à un hamburger. Un «frankensteak» de moins de 150 grammes dont la création, fortement médiatisée, a coûté la bagatelle de 250.000 euros mais qui, selon ses promoteurs, pourrait à terme répondre à une triple exigence: contribuer à nourrir l’humanité via cette nouvelle source de protéines; limiter les dégâts environnementaux causés par l’élevage industriel; et enfin contribuer au bien-être animal en réduisant la pratique de l’élevage en batterie et l’abattage de bovins, porcs et volailles. Tout cela sans priver les amateurs du plaisir de manger de la viande.

La question de l’approvisionnement de la population mondiale en protéines est l’un des grands enjeux d’avenir. Des solutions alternatives aux animaux d’élevage nourris aux céréales existent déjà ou sont à l’étude: la consommation d’algues, celle d’insectes (en snacking et, plus crédible, comme alimentation animale), ou, plus classiquement, le recours aux substituts de viande à base de protéines végétales restructurées (steaks de soja et autres solutions du style Beyond Meat), «un marché déjà mature qui ne se développe plus beaucoup et ne comblera pas les besoins futurs», estime cependant Pierre Feillet, directeur de recherches honoraire à l’Inra.

La viande artificielle fait donc désormais partie de ces alternatives, du moins en théorie. «Cette solution semble a priori satisfaisante à tous points de vue, en tout cas aux yeux de groupes très radicaux comme l’organisation Peta», remarque le sociologue Claude Fischler. En 2008, Peta (People for Ethical Treatments of Animals) avait d’ailleurs offert un million de dollars à celui qui arriverait à produire et commercialiser de la viande de poulet de synthèse avant le 30 juin 2012.

Mais de nombreux chercheurs ne cachent pas leur scepticisme, à commencer par l’Inra, qui a consacré une étude à ce sujet. L’un des auteurs, Jean-François Hoquette, directeur de recherches à l‘Inra et spécialiste de la question, a démonté méthodiquement la portée de cette innovation, lors d’un récent séminaire organisé par l’Ocha (Observatoire des habitudes alimentaires dépendant de l’interprofession laitière française) à Milan, dans le cadre de l’Exposition universelle qui se tient jusqu'au premier octobre 2015 autour du thème «nourrir la planète à l’horizon 2050».

Il a d’abord rappelé que la technique consistant à prélever des cellules souches capables de se multiplier jusqu’à 1018, puis de se différencier en cellules musculaires, est une techniques connue, notamment dans le monde médical (pour réparer un tissu musculaire lésé). Transférer cette technique hors de ce cadre pour fabriquer de grandes quantités de muscle est également maîtrisé, «y compris à l’Inra». En revanche, ajoute-t-il, seuls trois laboratoires dans le monde –celui de Maastricht, un autre à Tel Aviv et un labo privé américain, Modern Meadow, qui mise, lui, sur l’impression de tissus animaux en 3D– «croient qu’il y a là un potentiel technologique sous-exploité et qu’en quelques années de recherche on pourra construire des incubateurs géants qui produiront de grandes quantités de viande».

Produit bourré d’hormones

Première critique, évidente celle-ci, le prix du procédé (253.000 euros, donc). Un coût prohibitif qui s’explique: «il a fallu cultiver les cellules pendant six mois à une température de 37 degrés, avec de l’oxygène, dans un milieu de culture à base de sérum fœtal de veau, avec des hormones de synthèse , des acides aminés, des acides gras, des antibiotiques et des fongicides», explique Jean-François Hoquette. Cocktail ruineux et peu ragoûtant auquel on rajoute plus ou moins de matières grasses pour le goût, du jus de betterave et du safran pour la couleur.

Seconde critique, le résultat: «Un amas de 20.000 couches de cellules musculaires, qui ressemble à un burger, pas à un vrai steak.» Car les cellules musculaires ne sont pas vraiment reliées entre elles. «La viande, elle, est composés de fibres musculaires longues entourées d’une trame conjonctive dans lesquelles s’insèrent des nerfs, des vaisseaux sanguins, des cellules de matières grasses etc, attachées à des os, donc constamment en tension, poursuit Jean-François Hoquette. Le collagène entoure ces fibres et les rend solidaires entre elles. Or, dans cette viande in vitro, tout ceci manque. Donc selon nous, le laboratoire a travaillé de façon simpliste.» Manque aussi, ajoute-t-il, le processus de maturation de la viande (qui prend de dix à vingt jours dans le cas d’un bœuf abattu), essentiel d’un point de vue gustatif.

Troisième objection: les bienfaits sur l’environnement. Une étude mise en avant par le laboratoire de Maastricht montre que l’impact carbone de cette viande artificielle est très inférieur à celui de la viande d’élevage. Conclusion que Jean-François Hoquette remet en cause: «Tout dépend du type de viande et d’élevage. L’étude oublie de prendre en compte l’impact de la production des hormones et des acides aminés de synthèse, ainsi que le coût du chauffage et du nettoyage de ces hypothétiques incubateurs géants, sans parler des risques de pollution.» 

Enfin, l’adhésion future par les consommateurs (même très opposés à l’élevage industriel) à un produit bourré d’hormones, de fongicides et d’antibiotiques lui semble très improbable.

En vente à l’horizon 2020?

Mark Post a, depuis, répondu à plusieurs de ces critiques, annonçant sa volonté d’utiliser des ingrédients plus sains. Dans une interview accordée l’été dernier à The Observer, il reconnaissait qu’il faudrait vaincre la répulsion des consommateurs vis-à-vis de ce type de produits non sans ajouter que, selon des études menée par son labo, 70% des personnes interrogées jugeaient ces recherches bénéfiques. Il a annoncé travailler à l’élaboration d’un «vrai» steak et non plus d’un hamburger, tout en admettant que ce serait beaucoup plus complexe et qu’il lui faudrait collaborer avec des spécialistes de l’impression 3D.

Quant au prix pharaonique de son hamburger, «c’est un chiffre complètement artificiel», assurait-il, estimant qu’avec la montée en puissance de la production, «et même avec la technologie actuelle», le prix pourrait tomber à terme à 15 livres sterling (21 euros) le kilo puis baisser encore via une amélioration du process, pour devenir compétitif avec le bœuf d’élevage… Il se montrait en revanche très optimiste sur la date de commercialisation de sa viande synthétique, estimant «raisonnable» l’hypothèse d’un délai de sept ans, le temps de mettre en place une réglementation. Même si, selon lui, l’industrialisation de cette nouvelle filière devrait prendre au moins vingt ans.

«Nous avons interrogé des chercheurs de nombreux pays, tous estiment qu’il subsiste des verrous technologiques importants pour la viande artificielle», rétorque Jean-François Hoquette. Avant de reconnaître que les spécialiste chinois sollicités ont, eux, jugé l’initiative «intéressante». Et ils ne sont pas les seuls: la Silicon Valley est aux aguets. Le programme de Mark Post est en grande partie financé par Sergey Brin, cofondateur avec Larry Page de Google, dont il est directeur technique. Brin se dit en effet très soucieux du réchauffement climatique et du bien-être animal. Quant à la start-up Modern Meadow, adepte de l’impression de viande en 3D, elle a notamment été soutenue à son lancement par Peter Thiel –investisseur précoce dans Facebook et co fondateur de Pay Pal– via sa société philantropique Breakout Labs.

Que ces milliardaires américains du Net injectent des fonds dans la viande in vitro n’en fait certes pas des visionnaires, ce secteur sortant largement de leur domaine de compétences. Mais cela permet à ces laboratoires privés d’avoir du temps et de l’argent devant eux. De quoi inquiéter certains scientifiques qui voient aussi dans ces ambitions futuristes des visées transhumanistes plus ou moins irresponsables et le désir de «jouer avec les grands tabous», dont celui d’un cannibalisme sans meurtre (bien plus fort que dans le film Soleil vert). Quand The Observer lui demande s’il est possible de multiplier de la viande humaine en laboratoire, Mark Post commence d’ailleurs par répondre oui, avant d’ajouter avec une fausse pudeur: «Mais êtes-vous sûr de vouloir poser cette question?»
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Source : Slate.fr, Anne Denis, 5 septembre 2015