jeudi 26 novembre 2015

Les régimes «green» : aussi bon pour la planète que pour la santé ?

Végétarien, flexitarien, végétalien ou encore pescétarien, ces modes alimentaires séduisent de plus en plus. 

Supprimer steaks de bœuf et côtes de porc de son alimentation. Un choix d'alimentation tentant pour quiconque ne veut pas participer à l'élevage intensif et ce qu'il suppose de pollution. Mais pour rester en bonne santé, exclure les protéines animales doit rimer avec introduire plus de protéines végétales à ses repas. Et l'exercice est parfois difficile.

Ils sont tous deux docteurs en nutrition mais ne partagent pas le même avis sur les protéines animales. Le docteur Alexandra Dalu qui signe «Les 100 idées qui vous empêchent d’aller bien» (éditions Leduc.s) estime que l’Humain, en parfait omnivore, ne doit pas se priver de ces aliments «nécessaires» à l’organisme. Le docteur Jérôme Bernard-Pellet, auteur de «Comment manger moins de viande» (éditions La Plage) est cofondateur de l’APSARes, Association de Professionnels de Santé pour une Alimentation Responsable, qui fait la promotion d’une alimentation ayant l’empreinte écologique la plus faible possible. Il défend l’idée que les protéines végétales peuvent remplacer à 100% toutes les protéines animales. Nous avons confronté les deux.

Manger peu ou pas du tout de protéines animales est aujourd’hui devenu une tendance de vie, est-ce une bonne chose ?

Dr Alexandra Dalu : Si nous n’équilibrons pas nos repas, il y a risque de carences en macro et micronutriments, la frustration engendre par ailleurs des troubles du comportement alimentaire. Les régimes les plus stricts dont ceux qui suppriment toute protéine animale, sont parfois difficiles à suivre, contraignants et contre-indiqués pour les femmes enceintes, les gens malades, les adolescents en croissance, les enfants en bas âge, les sportifs de haut niveau…Si c’est contre-indiqué pour eux, autant dire que ce n’est pas idéal pour l’organisme. Aujourd’hui, on arrive dans une époque où il faut presque réhabiliter la protéine animale ! N’oublions pas que l’homme est historiquement chasseur-pêcheur-cueilleur et que les régimes crétois, méditerranéens et les études sur le régime des habitants de l'île d’Okinawa, sont les plus « cotés » au monde pour s’assurer une bonne santé cardio-vasculaire et de longévité.

Dr Jérôme Bernard-Pellet : Oui, sans aucune ambiguïté. En effet, il est désormais amplement prouvé qu'une alimentation majoritairement végétale voire 100 % végétalienne augmente l’espérance de vie. Il a été démontré récemment dans une étude de cohorte publiée en juillet 2013 dans le JAMA Internal Medecine. Inversement, une consommation excessive de viande rouge favorise le cancer du côlon, les maladies cardio-vasculaires, l'hypercholestérolémie, l'hypertension ainsi que le diabète de type 2. Même s'il faut bien sûr respecter le choix de chacun, les professionnels de santé ont intérêt à encourager une diminution de la consommation de viande. Il n'y a aucune contre-indication connue à ce jour pour les alimentations végétarienne et végétalienne d'après les études scientifiques qui sont synthétisées dans cette revue de la littérature de l'Association américaine de diététique. Les enfants, les femmes enceintes et les sportifs peuvent aussi suivre ce mode de vie s'ils le souhaitent.

Comment concilier préservation de la planète et de la santé?

Dr Alexandra Dalu : Celui qui préserverait le mieux la planète serait celui qui mange raisonnablement de tout, c’est donc l’omnivore qui justement varie les aliments. Imaginons une population qui ne mangerait que du végétal, il faudrait faire des champs à perte de vue, quel impact alors sur la terre ? Idem si nous ne consommions que des produits de la mer, cela favoriserait une pêche intensive. Ce sont des extrêmes à éviter que ce soit pour la santé ou en terme d’écologie, de commerce et de production. Il faut d’ailleurs notifier qu’à l’heure actuelle la CEE étudie les niveaux de pesticides que sont les perturbateurs endocriniens largement utilisés dans l’agriculture et ce qu’elle soit bio ou non. Les seuils selon l’INSERM sont contrôlés, mais les chercheurs de l’institut recommandent d’éviter les perturbateurs endocriniens retrouvés en trop forte quantité sur les végétaux pour la population la plus fragile telle que les fœtus surtout durant le 1er mois de grossesse, les enfants en pleine croissance, les personnes malades et les femmes enceintes à qui l’on conseille de consommer bio. Les personnes ayant une vie active intense et urbaine, doivent varier les plaisirs alimentaires en associant un fruit et un légume ou une crudité à son plat principal et faire de temps à autre des cures detox avec de la spiruline et de la chlorelle retrouvée dans des compléments alimentaires.

Dr Jérôme Bernard-Pellet : Végétaliser son alimentation est l'une des mesures les plus efficaces qu'un individu puisse prendre pour préserver l'environnement. La grande affaire est qu'il faut fournir en moyenne 10 calories à un animal pour n'obtenir en retour qu'une seule calorie sous forme de viande. Nourrir les animaux avec des végétaux qu'on pourrait consommer directement conduit ainsi à gaspiller environ 90 % des ressources en céréales et en légumineuses ! Ce sont 70 % des terres à usage agricole dans le monde qui, directement ou indirectement, sont consacrées à l’élevage d'après un rapport de la FAO. Par ailleurs, l’élevage émet plus de gaz à effet de serre que tous les moyens de transports réunis d'après ce même rapport.

Ne pas consommer de protéines animales, est-ce vraiment dangereux pour la santé ?

Dr Alexandra Dalu : D’un point de vue santé, il faut garder en tête qu’il y a risque de carence avec n’importe quel régime restrictif. Le meilleur conseil est de privilégier la variété des aliments, la richesse en aliments à haute valeur nutritionnelle, la « super food ». Il est par exemple démontré et rapporté dans le rapport de l’INSERM, que pour les seniors, un apport de protéines (poissons, viandes, œufs, produits laitiers) associé à une bonne activité physique est garant d’une bonne musculature luttant contre la sarcopénie (fonte des muscles), l’ostéoporose, le vieillissement physique en général et protège les fonctions cérébrales cognitives (langage, mémoire, coordination spatio-temporelle). Un apport nutritif insuffisant en macro et micro nutriments entraînent de nombreuses pathologies qui vont au delà des carences en fer, B12, B9. Deux études américaines récentes datant de 2014 publiée dans Cell Metabolism et l’autre dans Science, montrent l’impact bénéfique sur la longévité d’une petite restriction calorique en protéines animales avant l’âge de 65 ans mais pas au delà, donc attention !


Dr Jérôme Bernard-Pellet : Non, sans aucune ambiguïté. En vérité, les protéines végétales font mieux que les protéines animales. L'étude de cohorte du Dr Orlich ayant suivi plus de 73 000 patients pendant presque 6 ans l'a brillamment démontré. Non seulement la non-consommation de protéines animales n'a entraîné aucun préjudice chez les patients ayant choisi cette option mais par dessus le marché, elle a provoqué un allongement de leur durée de vie. Ceci fait prendre conscience que nous avons complètement surestimé l'impact négatif des éventuelles carences des alimentations végétarienne et végétalienne, largement compensées par des effets positifs. Le seul réel risque de carence concerne la vitamine B12 ce qui fait que je recommande une complémentation systématique avec 1000 microgrammes de vitamine B12 par semaine. La carence en vitamine D est un fléau de santé publique qui existe à la fois chez les omnivores et les végétariens par manque d'exposition au soleil. Inversement, les carences en vitamine B9, vitamine C et en fibres alimentaires sont plus rares chez les végétariens et végétaliens.
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Source : leparisien.fr, Lisa Malone, 26/11/2015

lundi 23 novembre 2015

"Les protéines végétales : répondre aux enjeux globaux" - Monographie de la Fondation Louis Bonduelle

La Fondation Louis Bonduelle vient de publier une nouvelle monographie sur les protéines végétales. Ce dossier scientifique répond à la question suivante : Et si l’avenir de la planète et des Hommes passaient par les légumes secs, les céréales, les graines et les noix ?

Dans le cadre de la COP21,  La Fondation Louis Bonduelle réaffirme l’importance des protéines végétales dans l’alimentation humaine, aussi bien par leur grande qualité nutritionnelle que par leurs avantages écologiques et économiques, évidents mais méconnus. Pour aller plus loin, la thématique des prochaines Rencontres de la Fondation Louis Bonduelle porterons également sur ce sujet. L’événement aura lieu le 7 juin à Paris.

Extrait

Selon les projections des experts de l’ONU, la consommation alimentaire mondiale devrait doubler au cours des vingt prochaines  années. Avec le défi de nourrir 9 milliards de personnes à l’horizon 2050, les préoccupations nutritionnelles, environnementales et de sécurité alimentaire engendrées par la production des aliments émergent au plan global.

Les protéines sont des nutriments essentiels à une alimentation équilibrée. Selon les zones géographiques et les cultures alimentaires, elles sont principalement apportées par des aliments d’origine végétale ou animale. Les protéines végétales sont présentes dans des aliments de haute valeur nutritionnelle. Souvent opposées aux aliments comportant des protéines animales, leur complémentarité devrait pourtant être valorisée.

Parmi les différentes approches préconisées, le développement de la production et de l’utilisation des sources de protéines végétales dans l’alimentation humaine est mis en avant.

En Europe, le marché des protéines végétales connaît une croissance lente mais régulière depuis 30 ans. Leur développement se heurte toutefois à plusieurs barrières, notamment sur les plans culturel et nutritionnel, d’où la nécessité de faire évoluer les perceptions et les comportements des consommateurs.

Télécharger la monographie sur les protéines végétales sur le site de la Fondation Louis Bonduelle (inscription gratuite)

mercredi 11 novembre 2015

Du haricot jaune au pois cajan: l'ONU a lancé l'Année internationale des légumineuses le 10 novembre 2015 à Rome

2016 sera l’année de la promotion des apports protéiniques et des effets bénéfiques sur la santé procurés par les légumes secs. 

Les légumineuses, notamment toutes sortes de haricots secs et de pois, sont une source bon marché, délicieuse et nutritive de protéines et de micronutriments essentiels et aux effets bénéfiques sur la santé et les moyens d’existence, en particulier dans les pays en développement, souligne aujourd’hui l'ONU dans un message annonçant le lancement en 2016 de l'Année internationale des légumineuses.

«Les légumineuses sont des cultures vivrières importantes pour la sécurité alimentaire de vastes tranches de populations, en particulier en Amérique latine, Afrique et Asie, où elles font partie de l'alimentation traditionnelle et sont souvent cultivées par les petits agriculteurs», a déclaré notamment M. José Graziano da Silva, Directeur général de la FAO.

«Les légumineuses ont, au cours des siècles, constitué une partie essentielle de l’alimentation humaine. Et pourtant, leur valeur nutritive est généralement méconnue et souvent sous-estimée», a-t-il ajouté.

«Les légumineuses peuvent contribuer de manière significative à la sécurité alimentaire et à la santé humaine, ainsi qu’à la lutte contre la faim, la malnutrition et les défis environnementaux», a indiqué de son côté le Secrétaire général de l'ONU M. Ban Ki-moon dans une déclaration écrite prononcée en son nom lors de la cérémonie de lancement de l’Année internationale des légumineuses.

Sous le slogan «Des graines nutritives pour un avenir durable», l'Assemblée générale des Nations Unies a déclaré 2016 Année internationale des légumineuses afin de sensibiliser sur les nombreux avantages que les légumineuses offrent, d’en stimuler la production et le commerce et d'en encourager de nouvelles utilisations intelligentes le long de la chaîne alimentaire.

Dans un geste symbolique après son allocution, le Directeur général de la FAO a planté une poignée de fèves dans un pot de terre au moment où il proclamait ouverte l'Année internationale des légumineuses.

Un potentiel inexploité

Les légumineuses font partie de la culture alimentaire et de l'alimentation de tous les jours du commun des mortels dans la plupart des régions du monde et constituent un ingrédient essentiel dans un grand nombre de plats nationaux ou régionaux, notamment le falafel, le dahl, le piment et les fèves au lard.

On trouve des centaines de variétés de légumineuses cultivées à travers le monde. Les plus populaires comprennent les différentes variétés de haricots secs, tels que les haricots rouges, les haricots de Lima, les haricots jaunes et les fèves, mais aussi les pois chiches, le niébé, les haricots à œil noir et les pois cajans (en savoir plus sur les légumineuses).

Les légumineuses sont une alternative aux protéines animales qui sont en général hors de portée des populations pauvres, ce qui les rend idéales pour améliorer les régimes alimentaires dans les régions moins favorisées de la planète. A titre d’exemple, les protéines procurées par le lait sont cinq fois plus chères que les protéines des légumineuses.

Du fait que les cours des légumineuses sont deux à trois fois plus élevés que ceux des céréales, elles offrent un potentiel supérieur pour tirer les agriculteurs de la pauvreté rurale et leur traitement représente des possibilités économiques supplémentaires, surtout pour les femmes rurales.

Les bénéfices sur la santé

Bien que de dimensions réduites, les légumineuses sont riches en protéines: le double par rapport au blé et le triple par rapport au riz.

Elles sont également riches en oligo-éléments, acides aminés et vitamines B qui sont, ainsi que l’a rappelé le Directeur général de la FAO, les éléments essentiels d'une alimentation saine.

Pauvres en gras et riches en nutriments et en fibres solubles, les légumineuses sont également excellentes pour la gestion du cholestérol et de la digestion. Leur forte teneur en fer et en zinc les rend un allié puissant pour combattre l'anémie chez les femmes et les enfants. Elles sont un ingrédient clé dans les régimes alimentaires conçus contre l'obésité et la prévention ou la gestion des maladies chroniques telles que le diabète, les conditions coronariennes et le cancer.

En raison de leur haute teneur nutritionnelle, les légumineuses sont un aliment de base dans les paniers alimentaires d'urgence et vu qu’elles ne contiennent pas de gluten, elles sont également appropriées pour les patients cœliaques.

Bienfaits pour les animaux et l'environnement

Les légumineuses ne sont pas seulement bénéfiques pour la santé humaine; elles améliorent aussi la santé des animaux et des sols tout en maintenant la biodiversité.

Les résidus de récolte de légumineuses sont utilisés comme fourrage pour augmenter la concentration d'azote dans l'alimentation animale, ce qui améliore la croissance et la santé des animaux.

Le Directeur général de la FAO a souligné en particulier la façon dont les propriétés fixatrices de l'azote des légumineuses améliorent la fertilité des sols, ce qui accroît la productivité des terres agricoles et élimine la dépendance à l’égard des engrais chimiques. Cela a d’ailleurs pour effet direct de réduire l’empreinte carbone et indirectement les émissions de gaz à effet de serre.

En outre, les légumineuses, en améliorant la santé des sols, enrichissent aussi la biodiversité du terreau où se multiplient les insectes, les microbes et les bactéries de toutes sortes.

Les légumineuses, en tant que groupe génétiquement extrêmement varié, détiennent également un grand potentiel pour l'adaptation au climat, car elles permettent aux agriculteurs de sélectionner de nouvelles variétés et d’adapter ainsi leur production à l'évolution des conditions climatiques.

Par ailleurs, l’utilisation des légumineuses comme cultures de couverture et dans les systèmes de cultures intercalaires – en les plantant entre d’autres cultures ou dans le cadre de la rotation des cultures – réduit l'érosion des sols et aide à lutter contre les ravageurs et les maladies des plantes.

Les co-présidents du Comité de direction de l'Année internationale des légumineuses, Aydin Sezgin Adnan et Nadeem Riyaz, représentants permanents de la République de Turquie et de la République islamique du Pakistan auprès de la FAO, ont prononcé, tout à tour, les discours d’ouverture et de clôture lors de la cérémonie qui s’est tenue aujourd’hui au siège de la FAO, à Rome. M. Mahmoud Solh, Directeur général du Centre international de recherche agricole dans les zones arides (ICARDA), a également présenté un exposé au cours de cette cérémonie marquant le lancement de l’Année internationale des légumineuses.

Signalons enfin que les Années internationales précédentes relatives à l’agriculture avaient pour thèmes les sols, l'agriculture familiale et le quinoa.
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Source : fao.org, 10/11/2015