vendredi 17 mars 2017

Où mangera-t-on le plus de viande en 2025? La réponse en carte

Seriez-vous capable de vous passer de bœuf, de porc ou de poulet? Le 20 mars sera l'occasion de l'essayer puisque ce sera la Journée internationale sans viande. Plusieurs pays ne sont toutefois pas près de lâcher le morceau, indiquent les projections de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Dans le monde, en 2015, une personne a mangé en moyenne 34,1 kg de viande, estime l’OCDE. Dans dix ans, les protéines animales seront toujours présentes dans l’assiette avec une consommation globale par personne de 35,2 kg.

L’influence des pays émergents

Selon l’agroéconomiste Pascal Thériault, la consommation globale par personne pourrait même augmenter à 38 kg, avec l’épanouissement économique des pays émergents comme le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine (BRICS).
"La Chine s’enrichit, rappelle le professeur à l’Université McGill. On développe une économie de services et de plus en plus, on va voir plus de consommateurs s’intéresser à la viande"  Pascal Thériault
Plus de mangeurs de viandes, plus de pressions sur les systèmes agroalimentaires, l’environnement et, donc, le prix. Devant cette possibilité, le gouvernement chinois tente déjà d’atténuer l’engouement au moyen d’un guide alimentaire plus restrictif.

« Récemment, la Chine a adopté un nouveau guide alimentaire qui encourage les gens à diminuer leur consommation de viande de moitié », rappelle Sylvain Charlebois en ajoutant que la tendance se dirige vers des viandes perçues comme étant plus santé, telles que le porc et le poulet.

Les Chinois séduits par le mode de vie occidental craqueront-ils pour le gros steak à l’américaine? «D’un point de vue environnemental, on espère que non, parce que le grain serait mieux utilisé ailleurs et qu’on mange déjà trop de viande », lance Pascal Thériault.

En ce moment, l’Américain moyen dévore 24,75 kg de bœuf par an, comparativement à 4,3 kg dans le BRIC. Une moyenne étonnamment basse, mais qui s'explique en partie par la grande préférence pour la volaille en Asie, mais aussi par l'alimentation plus végétarienne en Inde.

Sylvain Charlebois, doyen de la Faculté de management Université Dalhousie, à Halifax, n'est toutefois pas convaincu par ces statistiques de l'OCDE. « Je crois que la diminution par personne va continuer. Le coût croissant d’élevage et les considérations pour la santé, le bien-être animal et le développement durable, portées par les réseaux sociaux, décourageront les consommateurs à manger plus de viande, croit Sylvain Charlebois.

D'ailleurs, entre 2005 et 2015 au Canada, la demande pour le bœuf a diminué de 220 millions de kilogrammes. « C’est à peu près 6 kg par Canadien. C’est incroyable », explique le chercheur qui a publié l’an dernier une étude sur l’impact des prix du bœuf sur le comportement des consommateurs au Canada.

Le bœuf, ce luxe

La production bovine est particulièrement énergivore par rapport aux autres viandes, disent les chercheurs.

D’abord, le bœuf atteint sa maturité pour l’abattage au bout de deux ans alors qu’un poulet est prêt au bout de seulement six semaines. Quant aux besoins en nourriture, des producteurs obtiennent jusqu'à 1 kg de volaille avec 1,6 kg de moulée. Pour la même quantité de bœuf, on compte de 6 kg à 7 kg de moulée, mais aussi 8 litres d’eau.

« Ce n’est pas une filière qui est archi-efficace pour la conversion de fibres à protéine », reconnaît Sylvain Charlebois, et ça, malgré les améliorations en science animale. D’où l’engouement en recherche pour la viande rouge in vitro, qui ne requiert pas autant de temps, d’énergie et de ressources.

L'industrie lorgne aussi du côté des protéines végétales. Maple Leaf a d'ailleurs acquis pour 140 millions de dollars américains une entreprise spécialisée en la matière.

Ainsi, le bœuf est devenu une denrée de luxe et, du coup, aussi très vulnérable aux aléas économiques, comme les fluctuations des prix du grain et de l’énergie.

Les consommateurs, eux, se tournent plus vers le porc et le poulet. « On peut facilement substituer le bœuf haché par du porc », dit Pascal Thériault, en ajoutant que celui-ci arrive à maturité au bout de six mois et prend moitié moins de ressources que le bœuf.

Mais la viande la plus consommée dans le monde et qui gagnera en popularité d’ici 10 ans demeure le poulet, selon l’OCDE. En 2025, une personne en moyenne en mangera 14,2 kg/an, devant le porc (12,5 kg), le bœuf (6,7 kg) et l’agneau (1,88 kg)

Côtes levées contre grillons séchés

Dans son portrait, l’OCDE ne fait pas état des autres protéines qui se substituent aux viandes comme le poisson, les légumineuses ou encore… les insectes!

« En termes de conversion, je pense que l’insecte est très très élevé, mais il y a un blocage psychologique chez le consommateur. Quand tu vis dans l’abondance alimentaire, tu peux te permettre d’être difficile », conçoit Pascal Thériault.

Les légumineuses comme les lentilles et les pois chiches sont tout aussi efficaces pour l’omnivore qu’est l’humain, mais peinent à le séduire. « La légumineuse n’est pas quelque chose qui fait partie de notre diète de façon naturelle », dit Pascal Thériault en lançant à la blague que « ce sont les granos qui mangent ça. »
"L’humain est un accro du BBQ, alors c’est certain que les gens vont continuer d’acheter du bœuf."  Sylvain Charlebois
Si la Journée sans viande est un exercice intéressant, une vie plus végétarienne s’avère encore un défi.
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Source : ici.radio-canada.ca, Pascale Fontaine, 17/03/2017

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